Cette recherche concerne la dimension émotionnelle et l’affectivité telle qu’elle se donne à vivre en pédagogie perceptive et se trouve théorisée dans le paradigme du Sensible lui étant lié. Aujourd’hui l’émotion et l’affectivité constituent des objets de recherche de plus en plus valorisés en sciences humaines et sociales, cependant les enjeux sémantiques perdurent quand il s’agit de nommer l’expérience en question.
La pédagogie perceptive propose une pratique dont une des caractéristiques insignes est le rapport singulier au corps dans une intimité relationnelle du sujet à lui-même ; intimité touchée (Maine de Biran) parce que concernée au sens propre et figuré, touchante car elle émeut celui qui la contacte. Cette thèse vise à établir les liens entre la dimension émotionnelle et de l’affectivité telle qu’en parlent différents champs de recherche et l’expérience concrète vécue par les personnes. Dans cette étude, il s'agit de trouver un langage ajusté à une réalité émotionnelle et affective plurielle.
Cette recherche se fonde dans une vaste enquête exploratoire théorique au sein des champs de la recherche classique et contemporaine qui s’intéressent à l’émotion et à l’affectivité d’une part, au sein du champ de la phénoménologie d’autre part. Elle s’appuie également sur le corpus empirico-théorique spécifique de la psychopédagogie perceptive. Ces trois corpus permettent d’établir une sorte de cartographie du territoire compréhensif de l’émotion et de l’affectivité à partir duquel, sous forme de résonances, des allers-retours sont effectués entre vécus personnels en première personne, ceux issus de recherches déjà effectuées au sein du laboratoire du CERAP et la rencontre avec quelques auteurs. En suivant un élan intuitif, une centaine d’illustrations graphiques personnelles a constitué une voie de passage intégrative de la complexité d'un tel projet de recherche. Chemin faisant de cette exploration et des interactions, la thèse compte de l’évolution de la compréhension qui en est tirée, en première personne, et en particulier, dans la résonance avec l’approche phénoménologique de l’émotion et de l’affectivité.
La dynamique dialogique à l’œuvre est une posture impliquée qui est ici nommée posture de praticien-chercheur ému en raison de la manière avec laquelle le chercheur impliqué s'invite à s’émouvoir au contact des données quelles qu’en soient les formes. « Homme ému », cette expression éloquente se présente comme la voie d’accès à une réalité de terrain au cœur de cette recherche. Par résonances successives, quatre récits phénoménologiques enrichissent la discussion sur les liens possibles entre l’expérience du Sensible, l’expérience de nature affective qu’elle porte et un mode de compréhension phénoménologique de la dimension émotionnelle et de l’affectivité. À la faveur d’un questionnement sur le tissage serré entre l’homme Sensible et l’homme ému, la recherche qualitative présentée ici débouche sur une réflexion autour de l’émouvoir comme un support de la sensibilité.